Le littoral de Bandol s’effondre

 

P1040454Le littoral de Bandol est en danger ! Celui-là même qui inspire les jolies formules vendeuses « Vous ne quitterez pas Bandol sans goûter le calme voluptueux et la beauté des multiples calanques qui jalonnent le sentier de la corniche. » . Celui-là même que l’on prend en photo avec ravissement. Le littoral change, et devient parfois dangereux.

La frange forestière du bord de mer en danger

Les intempéries, pluies et vent, mais aussi un important ruissellement soumettent, lentement ou par décrochage brutal, le littoral bandolais à une érosion irréversible.
Notoirement, le littoral est reconnu comme un espace particulièrement fragile. En France, près d’un quart du littoral s’érode. Le littoral n’est pas un espace figé, il est évolutif. Soumis aux éléments climatiques, aux pollutions, à une surfréquentation saisonnière et à l’érosion naturelle, notre rivage est un espace vivant, qui évolue, s’érode et se renouvelle, quand il peut. Les précipitations contribuent fortement, par écoulement ou par infiltration, à cette évolution. Lorsque le béton ou le macadam sont trop près du rivage et bloque cette respiration, comme un corset trop serré, l’érosion est intensifiée et peut avoir des conséquences graves. Ce phénomène peut avoir un impact important sur les activités humaines, et pas seulement lors des balades dominicales.

P1040640

Un effondrement menace la route : aléas naturels ou facteurs humains ?

A Bandol, le dernier exemple en est l’effondrement récent de la corniche au niveau de l’avenue George V lors des dernières intempéries de fin d’année. Cette voie d’accès aux habitations riveraines qui borde la promenade vers la calanque de l’Anglaise est menacée. Depuis le début de l’année, chaque pluie fragilise un peu plus la matrice argilo-graveleuse friable qui supporte le macadam, d’autant plus que plusieurs constructions nouvelles sont prévues à quelques mètres en amont et vont ainsi accentuer les phénomènes de ruissellement à cet endroit par une avancée du bétonnage. Ces chantiers portent peut-être même une partie de responsabilité dans la fragilisation du talus littoral avec le passage répété de camions de matériaux ( une maison sur les 6 prévues est achevée, les autres n’ont pas commencé) : depuis l’accès est interdit aux 3,5t par arrêté du maire.  IMG_3385  P1040699

Le processus d’érosion appelle une gestion, dans le meilleur des cas, ou au minimum à une réaction, de la part des pouvoirs publics. Particulièrement dans le cas de formations plus ou moins meubles comme l’est le sentier littoral rocheux de Bandol. En matière de sécurité et d’intervention sur l’urbanisme, le maire est responsable de l’urbanisme de sa commune et de la sécurité de ses concitoyens face aux risques naturels, dont le risque de submersion ou d’éboulement.

Sur cette portion de l’aplomb, à l’entrée de l’avenue George V, plusieurs arbres ont été abattus, probablement à cause de leur dangerosité. C’est une des souches mortes qui s’est décrochée entrainant avec elle un pan du talus, au niveau de l’écoulement des flaques d’eau de pluie. D’importants moyens techniques, juridiques et financiers seront certainement nécessaires pour résorber la niche d’effondrement créée et sécuriser la route, une fois que les propriétaires de la parcelle privée auront été enjoints de faire pratiquer les travaux…

Le sentier du Capelan

Depuis plusieurs années, une autre portion du littoral bandolais se dégrade très rapidement : c’est le sentier du Capélan. Contrairement à la Presqu’île qui a été rachetée par la DDTM, le chemin du Capelan est propriété de la ville. Là encore, les arbres en bordure sont régulièrement abattus en raison des risques d’effondrement dû à l’instabilité des parois verticales à vif. Une réponse systématique avec effet durable pour le coup mais qui ne résoud rien, puisque même les souches mortes inertes peuvent s’avérer dangereuses et l’érosion continue de plus belle. Le déboisement sécurise à court terme l’usage du sentier mais fragilise ces sols qui se retrouvent parfois dégradés jusqu’à la roche-mère.

P1040698  AAB_2754

On peut se demander quels sont les axes de gestion communale pour cette mince bordure d’espaces naturels si représentative de l’image de la ville. L’association Bandol Littoral avait proposé, au mois de Mai dernier, lors de la dernière enquête publique relative au PLU, un projet visant à sécuriser les promeneurs et à favoriser une reprise végétale protectrice de la zone, en évitant toute action mécanique traumatisante.
Le sentier du Capelan est un mélange hétérogène de roches emprises dans une matrice de terre rouge, ferrugineuse et argileuse. Ses sols sont riches mais fragiles et particulièrement sensibles à l’érosion éolienne ou hydrique, surtout dans une situation de découverture végétale, ce qui est le cas aujourd’hui. Considérant le succés de la re-végétalisation de la pointe du Canet, l’idée s’est imposée de développer sur le long terme, le même schéma conservateur sur la continuité Ouest du sentier en procédant à un retrait du sentier pédestre de 1 à 2 mètres vers l’intérieur de la zone ( les Tennis et le Parc du Capelan sont aussi propriétés communales) pour écarter le piéton de tout risque d’éboulis, et
préserver les sols du piétinement qui empêche tout développement d’une végétation nouvelle.
Le dossier est toujours à l’étude en mairie.

A quand une valorisation nécessaire du littoral ?

Le sentier littoral se réduit à peau de chagrin, entre la mer et le béton, et par endroit laisse à peine la place aux piétons pour se croiser. Les plages de sable devraient pouvoir reculer naturellement en hiver, mais le béton les en empêche alors elles disparaissent. Au sens propre, notre littoral a le dos au mur et en devient potentiellement dangereux. Les calanques du Capelan, de l’Anglaise, les Engraviers ou la point du Canet sont autant d’espaces naturels qui font partie du patrimoine naturel de la ville et qui sont une ressource économique phare en tant que les seules zones naturelles «sauvages» du paysage maritime Bandolais. En cette période pré-électorale on entend beaucoup parler de relancer la manne économique qu’est le tourisme, mais que resterait-il de l’attrait touristique de la ville sans ces cartes postales emblématiques que sont nos calanques ?

Le littoral est vivant. Le trait côtier n’est pas figé. Il a besoin d’une latitude de retrait que le bétonnage, à Bandol, lui interdit. Une parution technique du SDAGE (Schéma Directeur pour l’Aménagement et la Gestion de l’Eau) sur cette problématique littorale concluait (en 2005) qu’«Il convient d’accepter l’évolution du littoral et de la gérer en engageant dès à présent des réflexions en terme de planification. Il est indispensable de respecter et de restaurer un espace de liberté, ou espace de mobilité, pour le littoral. Des études doivent être engagées rapidement pour définir et délimiter cet espace de liberté.»

Aujourd´hui une bonne gestion intégrée propose, dans une approche plus globale, de s’attaquer aux causes plutôt qu’aux effets : on pourrait commencer par une meilleure maitrise de la bétonnisation…

Initialement publié le 12 Février 2014 sur Bandolais.fr