Bandol : un paradis pour les voitures

Quand les aménagistes se penchent sur le cas de Bandol le constat est souvent le même. Les plus beaux points panoramiques de la ville sont réservés aux voitures. Etat de fait dans la logique des choses, puisque ces avancées urbaines furent créer dans ce but en gagnant sur la mer. Les années 70 n’ont pas su transformer la configuration linéaire du quai de pêche et de chargement de marchandises pendant l’essor balnéaire et immobiler, et ont simplement pris sur la mer l’espace nécessaire à ce nouvel élément urbain : la voiture.

 

“Les parkings à l’exception d’un parc de stationnement
à étage rue Perrault sont tous concentrés en bord de mer : le parking du Casino, le parking de la plage centrale, les stationnements en épis puis longitudinaux le long des quais, ceux en épis de l’allée Alfred Vivien et les deux parkings de part et d’autre du stade Deferrari.” Présentation du PLU

Dans les décennies suivantes, la voiture a vite engorgé la ville, autant au niveau de  la circulation et du stationnement que du panorama. Au plus il y a eu de nouveaux parkings, au plus il y a eu de voitures dans le paysage.

La fin du XXe siècle transforme radicalement la manière de penser l’aménagement urbain avec la prise de conscience que l’économie touristique doit impérativement préserver ses atouts naturels et la voiture, incontournable mais envahissante, devient désormais visuellement indésirable. A cette époque, les stationnements de la Poste, et le terre plein central du quai de Gaulle ont été remplacés par des espaces verts qui donnent une image plus attractive.

 

Au XXIe s. les parkings s’éloignent du bord de mer

Aujourd’hui les mesures de préservation des sites naturels, qui servent en outre d’énormes intérêts économiques induits, incitent les collectivités responsables à limiter l’impact des véhicules dans les zones fragiles, jusqu’à parfois même les interdire.

” Toutefois, la croissance économique générée par le développement du tourisme s’est souvent faite au détriment de l’intégrité environnementale et de l’équité sociale.[…] Tous ces éléments sont autant de problématiques qui menacent la durabilité de la région méditerranéenne et du secteur du tourisme lui-même.”
Les Cahiers du PLAN BLEU* N°17 – Tourisme durable en Méditerranée : état des lieux et orientations stratégiques.

C’est ainsi que le GIP Littoral Aquitain, dans ses réflexions d’aménagement durable des stations touristiques, intègre au PLU de la commune de Mimizan de nouveaux principes de mobilités et de circulation tels que la création de parking relais support de nouvelles pratiques de mobilité, et la suppression de parkings en front de mer…

Plus près de chez nous, le Parc national des Calanques n’autorise l’accès des véhicules qu’en période basse et l’interdit en période de surfréquentation, dès les beaux jours en week-end (printemps), et pendant la haute saison (été). Les raisons invoquées sont multiples : risque incendie, nuisances pour les riverains, saturation des axes de circulation et  dégradation du paysage.

 

Marche arrière dans les zones remarquables

Le Gaou, une perle protégée  En 1995, la mairie de Six-Fours a lancé une importante opération de réhabilitation du site du Gaou, dont la mesure la plus spectaculaire fut la suppression du parking en front de mer.

Dans les années 70, la grande île du Gaou était un camping, et la petite île du Gaou, la pointe Sud avec son restaurant de poisson, servait de parking. Mais fortement dégradé par des années de surfréquentation, le site présentait une très forte érosion des sols.

Aujourd’hui, le grand Gaou a été rendu à la nature et plus récemment, le petit Gaou, re-végétalisé, est aussi devenu zone protégée : on n’y vient plus désormais en voiture. Plusieurs parkings intermédiaires ont été aménagés entre le Brusc et la réserve du Gaou désormais piétonne.

• La Calanque de Port d’Alon. Dans cette propriété du Conservatoire du Littoral depuis 1980, la mairie de St Cyr limite les véhicules dans la calanque à un seuil maximum de 150

avec un accès payant en période estivale. Par ailleurs, le parking, qui a toujours existé, a été reculé d’une soixantaine de mètres et des arbres ont été plantés dans cette zone avant-plage pour le plus grand bonheur des baigneurs qui peuvent profiter d’un peu d’ombre. En cohérence avec cette politique de réhabilitation du site, la surface du restaurant a été revue à la baisse en 2005, passant de de 550m2 à 200m2.

Des solutions alternatives

Aujourd’hui, certaines villes font le choix de devenir en partie piétonne, comme Cassis, Sanary ou le Brusc, en haute saison touristique pour  privilégier le bien-être et diminuer les impacts négatifs de la voiture dont 40 ans après on mesure les effets.

Les nouveaux parkings misent sur la discrétion et se camouflent, souterrains ou en étage en centre ville, et végétalisés en zone naturelle (1 arbre /4véhicules). Les transports en commun, navettes, piste cyclable sont autant d’alternatives mises en place pour pallier à la saturation de la circulation et du stationnement. Les zones à disque bleu, zones “à 30”, zones de rencontre ou zones de circulations apaisées en sont d’autres.

“Dans les villes littorales, du fait de la fréquentation très différenciée entre les saisons, la piétonnisation s’est surtout jusqu’à présent traduite réglementairement par l’instauration d’aires piétonnes temporaires ; les collectivités disposent aujourd’hui d’outils réglementaires supplémentaires, tels que la zone de rencontre, pour réguler la circulation et organiser la mixité des usages.” Certu – Zones de circulation apaisée – Fiche n°6 Août 2010

Une nouvelle révision du PLU de Bandol serait un outil essentiel pour initier une réflexion et adapter des solutions alternatives, mettre en œuvre des Zones de Protection du Patrimoine Architectural, Urbain et Paysager (ZPPAUP)  ou encore un Plan Local de Déplacement (PLD) avec l’objectif de fluidifier une circulation problématique et une offre de stationnement ponctuellement insatisfaisante. Et même avant cela, la réfection du quai de Gaulle ne pourra pas faire l’impasse sur ces préoccupations récurrentes.

Aujourd’hui, que ce soit en zone naturelle ou urbaine, plus aucune commune littorale ne songerait à dévaloriser son capital paysager.

 

* Le PLAN BLEU – Tourisme durable en Méditerranée : état des lieux et orientations stratégiques.
La Stratégie Méditerranéenne pour le Développement Durable 2016-2025 repose sur la vision suivante : « Une Région Méditerranée prospère et pacifique dans laquelle les habitants bénéficient d’une grande qualité de vie et où le développement durable s’inscrit dans les limites de la capacité de charge d’écosystèmes sains.”