Compenser, pourquoi faire ?

La compensation, une notion qui vous est familière de manière générale ! Qu’elle soit financière, corporelle ou psychologique, la compensation est un mécanisme de rééquilibrage en réparation à une perte, un désagrément, une souffrance. En environnement, on parle d’atteinte et cette notion est officiellement une doctrine.

La doctrine ERC : «Eviter-Réduire-Compenser»

C pour “Compenser” ! Les 2 premiers principes étant, en priorité : “Éviter“, et “Réduire” les impacts, bien qu’on ait tendance à les oublier…

En 2012, le ministère de l’Ecologie (MEDDE) a publié cette doctrine, issue du Grenelle et relative aux impacts sur le milieu naturel, comme devant être un outil pour les maîtres d’ouvrage, leurs prestataires et les services de l’Etat.

Tout projet doit :

– en premier lieu s’attacher à éviter les impacts sur l’environnement,

– puis, à défaut, à les minimiser

– et, en dernier lieu en cas de besoin, à compenser les impacts résiduels.

Cette séquence ERC ne date pas d’hier puisque c’est la loi-cadre de protection de la nature du 10 juillet 1976 qui en avait jeté les bases déjà bien avant le Grenelle.

Pour faciliter la compréhension des principales lignes directrices, un guide d’aide à la définition des mesures ERC en définit le propos :

«Ce principe implique d’éviter les atteintes à la biodiversité et aux services qu’elle fournit ; à défaut, d’en réduire la portée ; enfin, en dernier lieu, de compenser les atteintes qui n’ont pu être évitées ni réduites, en tenant compte des espèces, des habitats naturels et des fonctions écologiques affectées.

Ce principe doit viser un objectif d’absence de perte nette de biodiversité, voire tendre vers un gain de biodiversité ».

Dans cette séquence, “la compensation est nécessairement subsidiaire et exceptionnelle”(1) puisqu’elle ne vient qu’en dernier recours, en cas d’échec d’évitement et de réduction.

Malgré ça, la compensation est pourtant parfois envisagée, à tort, en premier lieu, par rapidité et par facilité.

Un troc parfois douteux

Le principe de compensation suppose une équivalence de la réparation avec l’impact. Mais comment évaluer une perte qui n’est a priori pas chiffrée, et peut-être pas chiffrable ? Certains enjeux environnementaux paraissent peser trop lourd dans la balance : l’air que l’on respire, un particularisme géographique, un patrimoine historique… Là, le niveau de compensation est donc difficile à évaluer pour des écosystèmes particuliers ou des attentes sociologiques dont l’analyse va nécessiter un diagnostic complexe et précis, et impliquant un certain consensus (inventaire, enquête, étude d’impact, concertation…).

L’évaluation environnementale découle d’un processus en amont qui comprend un rapport du maître d’ouvrage sur les incidences du projet sur l’environnement et qui précise les mesures ERC.

Il arrive que le besoin de “simplification” impose parfois arbitrairement une solution calibrée. Par exemple, les PLU proposent un raccourci commode avec la formule : “un arbre abattu, un arbre replanté”, et ce sans mention des 2 premiers principes (Eviter – Réduire), et bien qu’il n’y ait pas d’équivalence écologique, patrimoniale ou paysagère entre un arbre mature et une jeune pousse. Dans les demandes de permis de construire quelques lauriers roses en remplacement d’arbres centenaires, font l’affaire ! Le principe de compensation est alors édicté en règle et exonère les projets urbains de devoir éviter ou réduire les atteintes à l’existant.

Une option désormais incontournable

Cependant même si les risques de dérive existent, cette doctrine est aujourd’hui incontournable. Toutes les autorisations des services de l’état y font désormais référence, et pour beaucoup de collectivités et d’aménageurs, la séquence ERC est intégrée comme une base méthodologique de projet, avec la seule compensation a minima.

La doctrine précise que «justifier d’un projet de moindre impact ne garantit pas forcément l’obtention des autorisations administratives nécessaires en cas d’impacts résiduels significatifs sur des enjeux majeurs», et insiste par ailleurs sur l’importance d’«un processus local de concertation et de suivi» et sur l’utilisation des «lieux d’expertise adaptés (organismes spécialisés, commissions, observatoires…), notamment sur les questions naturalistes et foncières».

S’appliquant à un projet environnemental, l’impact peut être d’ordre écologique, mais aussi paysager ou sociologique. L’environnement est autant l’habitat de toute une biodiversité que le nôtre. Il peut être d’intérêt écologique remarquable ou simplement à valeur intrinsèque de nature ordinaire comme pour la trame verte et bleue ou encore la lutte contre le réchauffement des zones urbaines et l’artificialisation des sols.

La séquence ERC est ainsi particulièrement d’actualité dans le contexte national avec le Plan pour la reconquête de la Biodiversité lancé tout récemment, mais aussi localement avec plusieurs projets qui ont ou vont impacter le paysage bandolais.

Aujourd’hui, les espaces verts et naturels dans une ville ne sont pas qu’une réserve foncière. A Bandol, ils sont rares et à ce titre d’autant plus précieux pour les habitants.

(1) “Cadre légal et institutionnel de la compensation biodiversité” de Matthieu Wemaëre et Anouk Ferté-Devin (2015)

Pour en savoir plus :

Evaluation environnementale – GUIDE d’aide à la définition des mesures ERC – Janvier 2018

Brochure de 134 pages