Le parc du Capelan pourrait-il disparaître ?

Quand l’exception devient une habitude…

C’est en invoquant la régularisation d’un pseudo « stationnement sauvage », habitude prise en réalité au fil d’autorisations « exceptionnelles » régulièrement délivrées, qu’un parking a été créé en 2018 dans le parc municipal du Capelan, qui est avant tout un espace naturel littoral. 

Cet été, l’usage de parking au Capelan a encore empiété un peu plus dans la partie protégée du parc (interdit aux véhicules derrière les barrières du parking), là encore par dérogations municipales :

Soit au total, 24 jours sur une période de 2 mois (47 jours du 30 juin au 14 août). Cette saison, pendant quasiment la moitié du temps, le parc du Capelan a donc fait office d’une extension privatisée du parking (cf photo).

Privatisation et grignotage du Capelan

Parking

Rétrospective : “Il semblerait que dans cette histoire, les « riverains et usagers » entendent bien continuer à profiter de ce lieu remarquable mais peu fréquenté à leur seul profit. Une forme de privatisation du domaine public.”

La formule presque militante est due à notre édile qui défendait, en 2017, sa conception du bien public contre une forte opposition de la population au projet de parking (une pétition avait recueillie plus de 8000 signatures) . “Précisons que ce terrain recouvert de graviers est interdit au stationnement (sauf dérogation par arrêté du maire pour certaines manifestations). On peut constater chaque jour ou presque que cette règle est loin d’être respectée. Qui profite de ce stationnement sauvage ? Quelques privilégiés.”[…] “L’objectif est simple : faire que ce parc ne soit plus la « réserve » de quelques initiés mais le bien public de tous.”

Ainsi, au lieu de faire appliquer l’interdiction de stationnement et le respect de l’espace naturel, c’est l’usage dérogatoire qui avait été rendu permanent et un parking avait été créé ! Parking qui aujourd’hui continue de s’étendre, ponctuellement (par arrêtés municipaux) mais régulièrement (à chaque évènement sportif) pour un usage… réservé ! Le fameux “bien public de tous” si particulier.

Aménagements d’aires de loisirs

Par ailleurs, la pinède classée (EBC) avait déjà connu des atteintes en apparence anodines avec les créations successives d’aires de jeux pour enfants (équivalentes en cumul à une imperméabilisation d’environ 165m2 de dalles de béton) pour implanter des structures en métal, en remplacement de l’ancien toboggan en bois et corde alors sécurisé par un tapis d’écorces de bois .

Plus récemment, dans le périmètre des tennis, la zone naturelle a 2 surfaces de jeu supplémentaires (soit une nouvelle imperméabilisation d’environ 450 m2). 

Quand certaines communes pensent à rafraîchir les villes en désimperméabilisant les sols bétonnés, d’autres réchauffent les espaces naturels avec plus de voitures et de béton !

Privatisation commerciale

La frange littorale extérieure si emblématique du Capelan a même été le théâtre de mises en scène privatives pour des pique-nique romantiques avec déco de bougies sur fond de coucher de soleil. En cette période estivale 2022 marquée par des records de canicule et d’alertes Incendie, les autorisations pour ce business, quand bien même original et séduisant hors contexte, paraissent pour le moins audacieuses !

Alors, selon cette logique de régularisation d’usages contraires rendus récurrents, le parc communal du Capelan est-il voué à disparaître en tant que tel ?

Les marqueurs de cette disgrâce du parc se concrétisent progressivement.

Un espace protégé qui n’est plus à protéger

Le parc du Capelan, sa pinède et sa façade littorale en falaise bénéficie règlementairement du statut d’espace naturel protégé à plusieurs titres -parc et espace vert communal, espace littoral remarquable (SCoT), espace boisé classé et zone naturelle littorale (PLU)- qui imposent des conditions et une attention toutes particulières (1).

Pourtant le poste de gardien du Capelan, revendiqué par la mairie comme étant celui des tennis et non pas celui du parc, a été supprimé lors du conseil municipal du 24 juin (délibération 23).

> « L’autorité territoriale souhaite aujourd’hui retirer de la liste les fonctions de gardien du site « Tennis du Capelan » pour la bonne gestion du domaine public, la présence d’un gardien sur site n’apparaissant plus nécessaire aujourd’hui. En effet, aucun incident n’a été relevé par les équipes de la police municipale et le gardien depuis plusieurs années.” […] “Bien qu’il ne soit pas identifié comme un endroit sensible par le service de la police municipale,” peut-on lire dans le compte-rendu du conseil municipal, en extrait ci-dessous, le site a quand même été “équipé d’un dispositif de vidéo-surveillance qui permet d’assurer une surveillance constante des lieux et sa sécurité. »

Le gardien, ayant trop bien gardé, se voit congédié car rien de fâcheux ne s’est passé ! 

Cet argument paradoxal laisse désormais le parc à la seule vigilance des caméras, la surveillance d’un espace naturel sous pression ne relevant pas pour la mairie d’une nécessité absolue.

Au rythme où vont les choses, doit-on s’inquiéter du devenir du parc du Capelan, livré à une exploitation libre de toute considération environnementale ?

Cet été a fait apparaitre définitivement que le changement climatique n’était ni une crise passagère, ni une option négociable. Ce capital de Nature est d’autant plus précieux que, soumis à l’érosion côté mer, il ne pourra plus être renouvelé. Le Capelan est le seul espace vert naturel littoral public à Bandol.