Un sentier sous-marin pour Bandol
Après St Cyr et Sanary, Bandol réfléchit à se doter d’un sentier sous-marin pour permettre la découverte du public de la randonnée aquatique. Le succès des interventions estivales de l’association Objectif Atlantide montre une réelle demande de la part de la population touristique ET locale. Le projet est dans les bacs…
À première vue, ce n’est pas très compliqué (un masque et une paire de palmes…), mais une législation administrative contraignante, des impératifs sécuritaires poussés dès lors qu’il s’agit du public… des avis pour et contre des intervenants consultés qui s’opposent avec de vrais arguments… de multiples raisons de faire ou ne pas faire rendent ce projet épineux.
Alors vraie bonne idée ou projet futile ?
Pour remettre les choses en place, qu’est-ce qu’un sentier sous-marin?
C’est une zone marine délimitée, dédiée à la petite randonnée aquatique ( durée : 30 à 45mn ) en PMT ( palmes/masque/tuba ), soit accompagné par un guide, soit en autonome en suivant des balises, et en général dans une zone naturelle protégée.
Ca sert à quoi ?
On a tous, ou presque, enfilé un jour une paire de palmes et mis un masque pour explorer nos eaux de baignades. Pas besoin d’un projet de Sentier Sous-Marin avec majuscule dans un épais dossier administratif pour faire des ronds dans l’eau ! Rien de plus banal pour un habitant de bord de mer que de mettre la tête sous l’eau…. Et bien, étonnamment, pas tant que ça… De nombreux petits Bandolais méconnaissent ce qui se passe sous l’eau, et leur émerveillement dès lors qu’ils croisent « un poisson » donne la mesure de leur ignorance. Certains pataugent bruyamment, d’autres s’agitent frénétiquement à la vue d’un ‘Gobi’ mais peu savent identifier et réellement observer ce qu’ils voient. Un sentier sous-marin a pour vocation la découverte et l’apprentissage d’un territoire de plus en plus ignoré et méconnu, par les touristes mais aussi par nos enfants ! Ce sont eux, les adultes de demain, qui sont héritiers de cette tradition maritime un peu oubliée, que tous les enfants d’hier, nos parents, connaissaient encore. Combien peuvent dire si cet oursin est mâle ou femelle, la différence entre une girelle paon et une girelle royale, ou plus simplement identifier un sar d’un mulet ? Dans cette logique de culture inhérente à notre particularisme local de bord de mer, la voile est au programme de nos petits écoliers, alors pourquoi pas l’apprentissage et le respect des bons gestes aquatiques. A Val Thorens, les écoliers chaussent leurs ski, ici ils devraient enfiler leurs palmes.
Ainsi, si l’idée ne déclenche pas forcément l’enthousiasme de prime abord, force est de constater qu’un minimum d’éducation du milieu marin serait peut-être une bonne chose pour une ville balnéaire ! Les trop nombreux exemples d’incivilité, voire de comportements dangereux, observés cet été (braconnage d’espèces protégées, fusil-harpons dans les mains d’enfants de moins de 16 ans en zone de baignade, ignorance du code maritime…) seraient déjà une bonne raison de revendiquer une école de la mer. A se focaliser sur les boutiques et l’attrait commercial de Bandol, on oublie un peu vite que c’est aussi une ville de bord de mer, avec un milieu naturel marin de plus en plus fréquenté, une faune et une flore qu’il convient de connaître et de protéger. Le monde ne s’arrête pas à portée de regard et même si la majorité ne la voit pas, il y a une vie sous-marine qu’un simple masque suffit à nous révéler. Ce serait déjà un bon début… On ne protège que ce qu’on connait.
Le projet de Sentier Sous-Marin se situerait dans l’anse du Capélan.
Historiquement, c’est un endroit assez fréquenté (surtout quand il était bordé par le camping dans les années 70-80) qui a toujours conquis ces visiteurs. C’est aussi l’abord littoral qui serait le plus en adéquation avec les nombreuses exigences sécuritaires et logistiques des administrations. Or ce site, la presqu’île du Capélan, vient de connaître récemment un traumatisme physique (pour sa préservation) avec sa « mise en sécurité » terrestre (d’une efficacité discutée) qui s’est traduite dans les faits par un effondrement de sa partie Nord. Alors que beaucoup réclament une protection du site, une fréquentation supplémentaire et sous-marine, si elle est mal maitrisée, serait un non-sens écologique… D’autant qu’en pleine saison ( le pic du mois d’Août), les calanques de Barry et de Capelan sont plus des soupes de pieds qu’un espace cristallin propre à la révélation aquatique. Les petites algues qui recouvrent les rochers immergés sont décrochées par le piétinement et le passage des baigneurs et restent ainsi en suspension. Résultat : l’eau est turpide et loin d’offrir la transparence que l’on pourrait attendre d’un sentier sous-marin. Pour autant le reste de l’année, l’endroit est idyllique avec ses eaux naturellement protégées du Mistral qui redeviennent cristallines dès le départ du flot estival. Alors dilemme ! Faire découvrir et risquer de dégrader encore plus un site classé sensible, ou mettre au tiroir un projet légitime à sensibiliser nos visiteurs et écoliers sur la préservation de la vie marine…? La réponse est probablement dans le compromis et la bonne mesure. Quelle serait la vôtre ?
Les exemples de sentiers sous-marins alentour (à Portissol et à Sanary) illustrent que le respect, les convictions et le bon sens peuvent rendre un tel projet viable et profitable tant pour une population touristique que locale. Mais comme dans tout projet, la mise en œuvre vaut autant que l’intention, malheureusement, les réalisations récentes de la municipalité ne sont pas rassurantes. La qualité de l’eau, le budget, la fréquentation, l’accessibilité, la préservation des lieux sont aussi autant de facteurs à prendre en compte… Alors ce projet verra-t-il le jour et comment ? à suivre…
Nathalie CAUNE
initialement publié le 17 Sep 2012 sur Bandolais.fr