ZOOM sur le SDGEP, ce document qui bloque le PLU de Bandol

Après l’enquête publique qui s’est déroulée du 25 mars au 26 avril 2024, le Plan Local d’Urbanisme révisé de Bandol a eu un avis favorable du commissaire-enquêteur. Pourtant il n’a toujours pas été adopté par vote du conseil municipal ! En cause la réserve assortie liée à la non-prise en compte du schéma de gestion des eaux pluviales : un risque Ruissellement bien identifié, mais que le PLU fait mine d’ignorer dans son règlement ! 

Sur le RUISSELLEMENT, extrait « En zone urbaine ce phénomène est aggravé par l’imperméabilisation des sols et l’urbanisation.
Trois composantes sont importantes : les axes d’écoulement, les zones d’accumulation, les secteurs de production (fortes pentes ou sols imperméabilisées). Il est regrettable que cet aspect du risque n’ait pas été plus développé (zones les plus sensibles, cartographie plus précise, identification par secteur des axes d’écoulement, des zones d’accumulation, des exutoires vers la mer) » 
Lire les conclusions complètes du Commissaire-enquêteur à l’issue de l’enquête publique : https://www.bandol.fr/wp-content/uploads/2024/05/1_Avis_et_Conclusions_motivees.pdf

Le SDGEP, à quoi ça sert ?

Le schéma de gestion des eaux pluviales (SDGEP) est un document de gestion et de programmation de travaux en matière d’eaux pluviales. Il facilite la compréhension du fonctionnement hydraulique du territoire et l’identification des enjeux associés en matière d’eaux pluviales. Jusqu’à présent du ressort communal, il relève depuis 2018 de la compétence intercommunale de Sud Sainte Baume.

Normalement, un SDGEP doit (selon art. R151-53-8°) être intégré au PLU communal pour aider à la réduction du risque d’inondation urbaine et de compensation à l’artificialisation des sols de moins en moins perméables.

En savoir plus : https://outil2amenagement.cerema.fr/outils/schema-directeur-gestion-des-eaux-pluviales-sgep-sdgep

Enjeu inondation et milieu marin

En littoral, au-delà de cette simple traduction réglementaire, la gestion des ruissellements permet d’aller plus loin pour la protection des milieux marins impactés par l’artificialisation des sols : moins l’eau de pluie est absorbée par les sols en amont (imperméabilisation), plus ça ruisselle (inondation) et tout part à la mer (pollution, plages fermées). L’augmentation de la densification urbaine (urbanisation) et l’intensification des épisodes pluvieux (changement climatique) rendent donc ce document d’autant plus prégnant pour les communes à fort versant littoral telles que Bandol ! 

Sauf que, le PLU de Bandol, au contraire d’une logique de protection, programme une densification d’urbanisation dans certaines zones concernées par le risque d’inondations par ruissellement (quartier de Pierreplane et zone hydrographique basse du Grand Vallon en amont des plages de Barry et Eden Roc) . C’est là qu’apriori les deux documents se télescoperaient dans leurs objectifs, l’un en limitation du risque, l’autre en augmentation de densité, objectifs incompatibles entre eux (à moins d’envisager un programme de travaux considérablement revus à la hausse) !
Et là est potentiellement le point bloquant, puisque les 2 documents ne peuvent pas se contre-dire… La révision du PLU a donc mis de côté la traduction règlementaire du SDGEP.

C’est en tout cas le sens de la réserve émise par le commissaire-enquêteur qui note “le faible développement du risque ruissellement et un éclatement des données au travers du dossier””Par contre l’aléa est bien identifié,” “Il est simplement dit, dans le dossier d’enquête, que le Schéma directeur des eaux pluviales était en cours d’élaboration.”…”On peut légitimement penser que le Schéma Directeur des eaux pluvial de la compétence de la CASSB viendra protéger les habitants de ce risque. Cependant, pour l’instant le Commissaire Enquêteur n’a aucune idée de ce qu’il pourrait décider.” . D’où sa conclusion :

”La commune devra attendre la diffusion du Schéma Directeur des Eaux Pluviales et prendre toutes les mesures adaptées pour assurer la sécurité des Bandolaises et des Bandolais avant de mettre en œuvre son PLU.”

Le jeu de la montre

A Bandol, on invoque un schéma inachevé : “L’’élu rappelle d’abord que “nous réclamons depuis longtemps un Schéma directeur des eaux pluviales, qui est, depuis 5 ans, une compétence de la communauté d’agglomération. Il était encore en cours d’élaboration durant l’enquête publique et nous avions d’ailleurs rencontré le commissaire enquêteur pour lui dire que nous attendions ce document, avec l’espoir qu’il présente toutes les assurances de prise en compte de cette problématique”.

Déjà opérationnel dans les communes de l’interco, certaines ayant déjà engagé les travaux requis, le SDGEP intercommunal n’a pas encore été approuvé définitivement en conseil communautaire. En effet, cette approbation est réciproquement bloquée par la commune de Bandol tant qu’elle n’est pas satisfaite du diagnostic émis sur son territoire.

Depuis, le document est tombé, mais : – Il ne correspond pas du tout à nos attentes, regrette l’élu.“Élaboré par Sud Sainte Baume, la première monture du Schéma directeur des eaux pluviales, ne satisfait pas aux exigences de la commune de Bandol. Le PLU révisé devra donc attendre encore…”

Pourtant le SDGEP finalisé avait été présenté aux communes de l’agglo, dont Bandol, en octobre 2023.

L’arrêt du projet de révision du PLU de Bandol a été voté après, par Délibération du 17 novembre 2023. L’enquête publique a eu lieu de fin mars au fin avril 2024. Dans le doute ou une réelle volonté de prendre en compte le SDGEP dans la planification bandolaise, l’enquête publique aurait donc pu être reportée. Deux élaborations concomitantes (lancées en 2021) pendant lesquelles (3 ans) il est difficile d’imaginer qu’il n’y ait pas eu de contacts et de nombreuses réunions avec les communes.

Cet argument des calendriers asynchrones et de l’inachèvement du processus officiel d’adoption du SDGEP pendant l’élaboration du PLU est teinté de mauvaise foi puisque les 2 documents, qui ont été menés en parallèle, auraient dû permettre idéalement, de manière itérative, de se nourrir l’un l’autre.

Je te tiens, tu me tiens par la barbichette…

Y aura-t-il une nouvelle version du SDGEP ? Faut-il vraiment s’attendre des modifications du Schéma directeur pour pouvoir corriger le PLU de BANDOL dans le sens de la réserve émise par le commissaire enquêteur quant aux importants risques de ruissellement ?

A priori NON, puisqu’en réalité il y a 2 choses à distinguer :

• Un SDGEP et sa planification de travaux sont établis par rapport à un diagnostic réalisé sur la commune dans l’objectif d’améliorer le réseau existant. Même si un SDGEP intercommunal suppose une prise en compte anticipée du changement climatique, il ne peut que spéculer sur un développement urbain raisonné des communes concernées, et pas sur des projets hypothétiques (tels que des OAP). Les travaux ont un coût souvent élevé pour les budgets des territoires. Le SDGEP a ainsi vocation à appliquer le principe de non-aggravation des risques.

Ce diagnostic identifierait apriori* des zones inondables incompatibles avec la forte densification prévue à Bandol par le PLU, notamment concernant l’OAP de Pierreplane ! [*Apriori” parce que notre demande de consultation dudit document a été refusée, bloquée aussi avant l’approbation officielle en conseil. Nous n’avons donc pas pu prendre connaissance des éléments initiaux du fameux diagnostic communal, objet de la polémique…]

• La nouvelle étude exigée par la commune de BANDOL (cf article VM du 27 juin) concernerait une évaluation localisée de l’aléa INONDATION (débit, hauteur d’eau, vitesse) sur des zones identifiées à risques et dans lesquelles sont prévues des OAP ou une densification urbaine par le PLU révisé. « Selon Jean-Pierre Chorel, les secteurs les plus impactés par le risque inondations sont effectivement Pierreplane, (…) et surtout, le vallon des Orangers ». [NDA, le “vallon des Orangers” est le talweg du Grand Vallon qui se jette à Eden Roc et qui constitue une zone hydrographique basse – ExZEco, pour “Extraction des Zones d’Ecoulement”] Des données qui relèveraient plus d’un PPRI (plan de prévention du risque inondation) pour déterminer la constructibilité d’une zone que d’un SDGEP (dont le rôle se limite à programmer les améliorations nécessaires au réseau existant) puisqu’une fois un aléa identifié, il est peu vraisemblable que le risque disparaisse ; il sera au contraire aggravé proportionnellement à la multiplication des enjeux bâtis. Il y aura donc au mieux l’ajout d’une annexe listant les précautions à prévoir en cas de construction.

Ainsi, plutôt que d’adapter son projet de ville aux risques existants ou à venir, la mairie attend un SDGEP moins contrariant. L’objectif de ce forçage est visiblement le maintien du zonage et de certaines OAP tels que projetés par la révision du PLU dans des secteurs où la constructibilité devrait être limitée.

Dans quelle mesure le PLU devra-t-il ensuite être remanié pour intégrer le SDGEP ?…

A la fin de ce bras de fer, le Zonage Pluvial du Schéma Directeur devra être, lui aussi, soumis à une consultation publique, d’ici la fin de l’année peut-être… Quant au vote de la révision du PLU attendu pour octobre 2024…

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Lire aussi NOTRE AVIS versé à la consultation publique de la révision du PLU.